Héloïse  

Héloïse, une ascendance controversée
 

Le nom d'Héloïse

Ce nom Héloïse, peut prendre des formes diverses : Heloisa, Heloysa, Heluisa, Alvisis, Eluidis, Heluis, Aduisa etc. Tous ces noms se rattachent à une racine commune Louis, Louise en français moderne

C'est un nom assez commun au XIIe siècle qui ne nous permet pas savoir s'il fait référence à l'une ou l'autre des familles aristocratiques de l'Île de France. "Vers l'an mil ... le lignage régissait son capital de noms possibles avec une relative rigueur." Un siècle plus tard l'imposition d'un nom baptismal a modifié les coutumes ancestrales. "La dévolution du nom au sein de la famille ne permet plus de situer un individu"  nous dit Guy Lobrichon. Cet historien, professeur à l'université d'Avignon, est l'auteur de la dernière et remarquable biographie d'Héloïse, "Héloïse, l'amour et le savoir". Il a fait une enquête sur un certain nombre d'Héloïse/Helvise et il en trouve une, femme de Guillaume II, comte d'Évreux 1067-1118 dont, coïncidence, le mari fut châtré pour avoir violé une jeune fille. Pas plus cette Héloïse que les autres n'indique une parenté avec l'Héloïse d'Abélard ni ne permet de situer cette dernière.

Guy Lobrichon, Héloïse, l'amour et le savoir, Paris, Gallimard 2005


Héloïse par Guilleminot, gravure de François
Le Plutarque français

L'oncle maternel Fulbert


 

Jean Vigaud, 1775-1826
Abélard et Héloïs
e surpris par Fulbert
Joslyn art museum, Omaha, Nebraska


 

Nous savons aussi, par Abélard, qu'Héloïse a un oncle, "avunculus", du côté de sa mère, le chanoine Fulbert, chanoine au chapitre de Notre-Dame de Paris.
"Il y avait alors à Paris une jeune fille nommée Héloïse, nièce d'un certain chanoine Fulbert."
Abélard, Historia calamitatum
Abélard affirme que cet oncle est très cupide mais qu'il aime tendrement sa nièce. Il est prêt à l'héberger chez lui dans l'enceinte du cloître Notre-Dame habité par les chanoines et à engager, à grands frais, un précepteur pour assurer à celle-ci la meilleure éducation possible : ce sera Abélard. Les chartes parisiennes connaissent ce Fulbert entre 1107 et 1124, voire même plus tôt en 1102. C'est certainement un haut dignitaire, doté d'un prébende dans l'église épiscopale de Paris, qui ne saurait exercer sa charge sans l'assentiment du roi Louis VI. Fulbert appartient donc à l'aristocratie. Pour avoir organisé la castration d'Abélard, ses biens lui seront confisqués, sa charge lui sera enlevée ... au moins pour quelque temps, car il est rétabli dans son canonicat en 1129 (Clanchy).
Ludovico rege, quidam canonicus nomine Fulbertus Parisius erat qui os integrum de spina sancti Ebrulbi habebat, quod capellanus de capella Henrici regis Francorum subtraxerat, eique jamdudum pro amoris pignore dederat. Timens autem pro diversis causis illud habere, Fulcone presbytero Mauliae mediante, accersit Guillelmun de Montserolo priorem Mauliae eique reliquias tradidit deferendas Uticensi ecclesiae."
André Duchesne, note 25, voir infra., d'après Orderic Vital.
 
Mais est-ce le même Fulbert ?

Obituaire du Paraclet

Si l'on se réfère à l'édition "princeps" de 1616 des oeuvres d'Abélard, on y trouve, dans la préface apologétique de François d'Amboise, une courte phrase qui affirme qu'Héloïse appartenait légitimement à la noble famille des Montmorency.
Heloissa vero, ut altera Susanna aut Esthera, pulchra et deum timens, vetustissimos illos Monmorantius legitima agnatione contingens, ...
Pourtant le coéditeur, André Duchesne, n'en souffle mot et cite au contraire, en note du texte de "l'Historia calamitatum",  la phrase de Papyre Masson qui croit à une naissance illégitime, comme on le verra plus bas. Duchesne n'accepte pourtant pas cette position et la réfute en s'appuyant sur l'obituaire du Paraclet.
note 23. Adolescentula quoedam nomine Heloissa. Vir doctus Papyrius Massonus lib. III annal., hanc heloissam praestanti ingenio formaque puellam, ait fuisse filiam naturalem Joannis nescio cujus parisiensis canonici. etc.

Un seule chose, en effet, paraît certaine, c'est le nom que porte la mère d'Héloïse, Hersende, qui nous est donné par l'obituaire du Paraclet. Il s'agit d'un manuscrit tardif du XIVe siècle mais qui reproduit à l'évidence un nécrologe ancien "compilé sans doute à partir de la fin des années trente du XIIIe".
À la date du 1er décembre :

"Hersendis mater domine heloise abbatisse nostre"  Hersende mère de dame Héloïse notre abbesse.
Le même obituaire dira d'Héloïse à la date du 16 mai :
Notre mère en religion, Héloïse, la première abbesse.
La notice est sèche, même si les obituaires en général ne sont pas diserts. Curieusement, il n'est jamais question du père d'Héloïse. Peut-être peut-on  voir dans cette discrétion la trace d'une filiation illégitime. Il faut toutefois noter que la naissance illégitime ne pose pas beaucoup de problèmes moraux ou politiques au début du XIIe siècle. Guillaume le Conquérant, duc de Normandie, ne sera-t-il pas un bâtard de Robert le Diable.
 

Les opinions au XVIIe et XVIIIe siècle : la fille d'un chanoine

Papyre Masson 1544-1611, avocat et historien, fait d'Héloïse la fille d'un chanoine du nom de Jean, chanoine de Paris, sans autre précision.
"Joannes canonicus parisinus Heloysam naturalem filiam habebat prestanti ingenio formaque."

C'est en 1687 que Bussy-Rabutin, le cousin de madame de Sévigné, publie et adresse à la marquise sa traduction fantaisiste et galante des lettres. Quelques années plus tôt l'avocat grenoblois Alluis avait aussi publié, dans le même esprit les "Lettres et épîtres amoureuses d'Héloïse et d'Abeilard". Bussy a l'imagination fertile, il trouve plus simple de voir dans Fulbert le véritable père d'Héloïse :
"Héloïse est la fille naturelle du chanoine Fulbert qui l'avait eue d'un commerce clandestin avec une fille nommée Geneviève qui accoucha d'Héloïse à Corbeil etc ..."
C'est cette même position que prendra Bayle dans son "Dictionnaire historique et critique" paru pour la première fois à Amsterdam en 1697 et réédité pour la cinquième fois en 1740.
"Si l'on avait à soupçonner quelque chanoine là-dessus, ce devrait être plutôt Fulbert qu'aucun autre, car la tendresse qu'Abélard lui donne pour Héloïse est si peu commune parmi les oncles et ressemble si naïvement à l'affection des meilleurs pères qu'il y aurait lieu de s'imaginer que Fulbert fit comme une infinité d'autres qui ne peuvent pas être pères selon les canons; ils cachent cette qualité sous celle d'oncle, ils élèvent leurs enfants sous le titre de neveux."

Dans l'édition de 1796, le préfacier de Moreau le jeune, M. de L'Aulnaye ne fera guère que copier Bayle avec une pointe encore plus marquée d'anticléricalisme.
« Suivant l’opinion la plus commune, Fulbert fut l’oncle maternel d’Héloïse. On ne sait rien de plus sur sa famille, car il ne faut point s’arrêter au dire de François d’Amboise qui prétend qu’elle était de l’illustre maison des Montmorency. Cette opinion n’est appuyée d’aucune preuve non plus que celle de Papyre Masson qui veut qu’Héloïse ait été fille naturelle d’un chanoine nommé Jean. Si quelqu’un devait être soupçonné de lui avoir donné naissance, ce serait bien plutôt Fulbert lui-même qu’un ancien calendrier du Paraclet appelle Hubert. Il est à croire que dans ces temps là comme de nos jours, les prêtres avaient des nièces qu’à la faveur de cette prétendue parenté, ils élevaient sous leurs yeux ; et la tendre amitié de Fulbert pour Héloïse ne laisse presque aucun doute sur la nature des liens qui l’unissait à elle. »
Lettres d’Héloïse et d’Abailard, édition ornée de huit figures gravées par les meilleurs artistes de Paris, d’après les dessins et sous la direction de Moreau le jeune. Édition en latin et en français de la traduction de Gervaise, précédée de la vie d’Abailard par M. de l’Aulnaye. Page 22, note 2

Reprise contemporaine.

Le docteur Roland Oberson de Lausanne a repris cette hypothèse qui fait d'Héloïse la fille de Fulbert. Il a publié coup sur coup cinq ouvrages aux éditions l'Âge d'Homme, à Lausanne. En 2001, "Abélard mon frère"; en 2002, "Lettre d'Héloïse et d'Abailard, version de 1723 de Dom Gervaise et vie d'Abailard de M. de L'Aulnaye";  en 2002 de nouveau, "Lettre de consolation à un ami et correspondance d'Héloïse et d'Abélard", nouvelle traduction; en 2002 encore, "Personnages de l'affaire Abélard", dictionnaire de Pierre Bayle;  en 2004, enfin, "La Héloïse forcée".
La thèse soutenue ici va beaucoup plus loin que les sous-entendus grivois de l'époque des lumières. Elle procède par une analyse psychanalytique poussée, qui se veut pertinente, des textes que nous connaissons. Cette thèse s'emploie à démontrer que la relation entre Fulbert et sa prétendue nièce, qui n'est autre que sa fille, est en réalité une relation incestueuse. L'enfant attendu d'Héloïse n'est pas d'Abélard. Celui-ci a été attiré dans un traquenard par le père, violeur de sa propre fille, pour sauver la face et jouer le rôle de père de substitution. L'auteur découvre dans les obscurités et les non-dits des textes un sens, au second degré, qui passe inaperçu pour le profane non versé dans la psychanalyse. Faut-il se laisser entraîner dans cet a priori de suspicion ? Cet éclairage original rencontrera certainement, malgré la qualité de l'argumentation, beaucoup d'attitudes dubitatives. Deux autres ouvrages sont au surplus annoncés : "Héloïse Vierge et mère" et
"Héloïse ni maman ni épouse".
 

Orientations au XIXe et XXe siècle : la fille d'une abbesse

Hersende de Sainte-Marie-aux-Bois
F. C. Turlot en 1820, dans son "Abailard et Héloïse"  revient à l'hypothèse des Montmorency et cherche la mère en retenant le nom donné par l'obituaire du Paraclet : Hersende. Il  trouve, près de Sézanne, en Champagne, le couvent de Sainte-Marie-aux-Bois dont l'abbesse vers 1150 se nomme Hersende. Pourquoi ne serait-elle pas cette Hersende, mère d'Héloïse ? Le monastère d'Argenteuil n'est pas trop loin et Héloïse pourrait y avoir été élevée.

Hersende de Saintloi
Beaucoup plus récemment, Mrs.
Brenda Cook, généalogiste de "Institute of historical reserch, University of London", croit pouvoir identifier Hersende dans une autre abbesse ou au moins une autre moniale. Elle publie en septembre 2000 "The birth of Heloise. New light on an old mystery".  Elle remarque d'abord que le 1er décembre, jour de la commémoration d'Hersende dans l'obituaire du Paraclet est aussi  le jour de la Saint Éloi. Elle note également que le monastère Saint-Éloi, fondé à Paris dans l'Île de la Cité, par Éloi, évêque de Noyon vers 641-660 traversa au début du XIIe siècle une grave crise morale. Les moniales furent accusées par Suger d'avoir rompu leurs voeux de chasteté et d'avoir fait de leur couvent une caverne de prostitution ouverte aux hommes et en particulier aux hommes du clergé. En 1105, Galo de Beauvais est élu évêque de Paris. C'est un partisan de la réforme grégorienne. Il faut mettre un terme aux scandales de Saint-Éloi. En 1107 il installe à la place des moniales, les moines de Saint-Pierre-du-Fossé. Les religieuses sont alors dispersées en divers couvents. L'un de ces couvents pourrait être selon  Mrs Brenda Cook l'abbaye d'Argenteuil, peu éloignée, plutôt que Sainte-Marie-aux-Bois en Champagne. Par surcroît l'une de ces moniales se nomme Hermensendis, ce qui est une variante d'Hersende. Enfin on trouve dans un acte du monastère Saint-Éloi daté de 1102 le nom de Fulbert, chanoine, comme témoin d'une vente alors que l'abbesse se nomme Helvisa. Héloïse pourrait donc être la fille naturelle de cette moniale Hersende,  soeur de ce chanoine Fulbert. On lui aurait donné le nom de son abbesse Helvisa qui n'est autre qu'une variante d'Héloïse. Sa mère l'aurait emmené avec elle à Argenteuil où elle aurait pu faire son éducation sous la surveillance de son oncle Fulbert.

Téléchargez au format Pdf le texte anglais de Brenda M. Cook
"The birth of Heloise, new light on an old mystery"

Hersende de Champagne
C'est le sujet du livre très documenté du docteur Werner Robl, Neustadt, Allemagne, "Heloisas herkunhft, Hersendis mater". Ce livre de 308 pages, publié à Munich en 2001 chez Olzog Verlag GmbH, s'appuie en particulier sur la date de la mort de la mère d'Héloïse selon l'obituaire du Paraclet, soit le 1er décembre. L'auteur  dresse un portrait robot de la mère d'Héloïse et constate qu'Hersende de Champagne correspond bien à ce portrait, notamment parce qu'elle est décédée un 30 novembre, à un jour près du 1er décembre. Hersende de Champagne est la fille de Hubert II de Champagne et d'Agnès de Clairvaux. Elle a été mariée deux fois et son second mari est  Guillaume de Montsoreau, Montsoreau au confluent de la Vienne et de la Loire. De ce dernier mari, on sait qu'elle a eu au moins un fils Etienne. Séduite par les prédications de Robert d'Arbrissel, elle s'associe au groupe de femmes qui le suivent, se "convertit" et fonde avec lui le monastère de Fontevrault. Elle en sera la première prieure. Son entrée en religion l'empêche de s'occuper de sa fille qu'elle a pu avoir soit avant soit après sa conversion. Cette fille, Héloïse, est alors confiée aux nonnes d'Argenteuil.

Le docteur Werner Robl voit une confirmation de cette hypothèse dans la connaissance qu'Abélard avait de la vie de Robert d'Arbrissel son ainé mort en 1116/1117. Qui aurait pu lui communiquer ces informations sur Robert d'Arbrissel sinon Héloïse qui les auraient tenus de sa mère Hersende, première prieure ? Il ajoute que Pierre le Vénérable, abbé de Cluny, a eu avec Héloïse une correspondance qui montre qu'une véritable amitié les unissaient. Héloïse pourra dire à Pierre, parlant d'Astrolabe : Astralabia vestro, à votre Astrolabe. C'est probablement la mère de Pierre, Raingardis, qui ayant projeté de rentrer à Fontevrault, a pu avoir des contacts avec cette même Hersende qui en était prieure. Les deux femmes auraient pu évoquer facilement Héloïse. L'auteur prend bien soin de présenter son travail comme une hypothèse sans prétendre atteindre à la vérité historique. Cette hypothèse, dit-il, ne pourra peut-être jamais être prouvée. Peut-elle être infirmée ?

Gilbert de Garlande serait son père.

C'est l'autre piste qu'a choisie le professeur Guy Lobrichon dans son ouvrage déjà cité. Faute de connaître la mère d'Héloïse, peut-on avoir quelque idée du père ? Déjà Robert-Henri Bautier, dans "Abélard en son temps", actes du colloque organisé à l'occasion du neuvième centenaire de la naissance d'Abélard, Paris, Belles Lettres , 1981, avait montré les liens étroits d'Abélard avec le clan des Garlande. La famille a ses entrées dans l'entourage du roi, soit Philippe 1er mort en 1108, soit son fils Louis VI le Gros. "Ils (les Garlandes) évoluent dans le premier cercle du pouvoir". Le plus connu des frères est Etienne de Garlande, vers 1070-vers1148, archidiacre, chanoine de Paris au même titre que Fulbert, candidat malheureux à l'évêché Beauvais. Tout en restant ecclésiastique il remplit les fonctions de chancelier du roi, en quelque sorte premier ministre, puis sénéchal, c'est à dire chef des armées. Il deviendra enfin doyen de l'abbaye Sainte-Geneviève. Abélard citera une fois le nom de ce puissant protecteur qui le défendra lors de son conflit avec l'abbé Adam de Saint-Denis. C'est à un moment crucial de sa vie, quand il décide de quitter Saint-Denis pour fonder le Paraclet.

"L'abbé (Adam) s'obstina, et partit sans avoir changé d'avis. Or, peu de jours après, il mourut. Avec l'appui de l'évêque de Meaux, je priai son successeur (Suger) d'agréer ma demande. Il hésita d'abord; mais quelques‑uns de mes amis intervinrent et présentèrent ma requête au conseil du roi : j'obtins ainsi ce que je désirais. Etienne, officier de bouche du roi, fit venir l'abbé et ses conseillers. Il leur demanda pourquoi ils voulaient me retenir malgré moi : ils s'exposaient ainsi à un scandale inutile, puisque mon genre de vie était incompatible avec le leur. Je savais qu'au conseil du roi on avait manifesté l'intention de freiner par un contrôle plus strict l'irrégularité des moeurs de l'abbaye, et par des mesures fiscales son attachement aux biens temporels. Je comptais, pour cette raison, que le roi et les siens me soutiendraient. Ainsi arriva-t-il. Toutefois, de peur de ravir au couvent de Saint-Denys l'honneur qu'il tirait de mon nom, on soumit à une condition mon droit de choisir une retraite : je ne devais pas me placer sous la dépendance d'une autre abbaye. Cet accord fut conclu et réglé en présence du roi et de sa cour. Je me retirai sur le territoire de Troyes, dans un endroit désert que je connaissais. Quelques personnes me cédèrent un terrain où, avec l'assentiment de l'évêque, je construisis une chapelle de roseaux et de chaume, que je dédiai à la Sainte Trinité. Je m'y cachai avec un de mes anciens élèves."
Abélard, Historia calamitatum


Jean de Meun, Roman de la Rose,
enluminure d'un manuscrit du XVe siècle
British Library, Londres
Photo © AKG-images-british Library

Il y a donc quatre frères Garlande qui seront tour à tour sénéchal. Un cinquième frère, Gilbert de Garlande, sera bouteiller du roi, c'est à dire chargé des approvisionnements, ce qui est un poste moins prestigieux mais source de grands profits. Cependant un autre clan se dispute les faveurs du roi : celui de Guillaume de Champeaux, l'écolâtre du cloître Notre-Dame, adversaire d'Abélard, celui des moines de Saint-Victor, des évêques de Paris, Galon et Etienne de Senlis, des abbés de Saint-Denis, Adam puis Suger. La carrière du clan Garlande connaît donc des périodes fastes et des phases de disgrâce. Mais l'avènement de Louis VII en 1137 sera l'heure de leur définitive élimination. C'est dans ce Gilbert de Garlande que Guy Lobrichon, franchissant le pas et adoptant l'hypothèse du professeur Theodore Evergates, voit le père de Dame Héloïse. Th. Evergates avait publié en 1995 "Nobles and Knights in twelfth-century France". On connaîtrait trois frères d'Héloïse; l'un Manassès serait devenu évêque d'Orléans. Cette thèse rejoint les propos de François d'Amboise de 1616 qui  faisait d'Héloïse une noble descendante des Montmorency car les liens entre les Montmorency et les Garlande sont connus. Cette ascendance noble d'Héloïse, fille de Gilbert de Garlande, expliquerait bien le soutien que le couple a pu recevoir tout au long de son existence mouvementée.

"La protection accordée par les Garlande à Pierre Abélard ne s'explique pas seulement par le compagnonnage d'Etienne de Garlande et de Pierre  au sein du chapitre cathédral de Paris : elle se resserre quand Pierre rencontre Héloïse."
Guy Lobrichon op. cit. p.127


Faut-il conclure ?
Ce n'est sans doute pas nécessaire. À chacun de choisir son Héloïse ! Mais si vous avez des arguments à ajouter  pour appuyer l'une ou l'autre thèse, si vous estimez que la présentation qui a été faite est trop simpliste ou que la pensée des différents auteurs a été mal interprétée, voire travestie, n'hésitez pas à vous manifester et à prendre contact.

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© Association Pierre Abélard 2006