Saint-Gildas de Rhuys
Abélard devient abbé bénédictin 1127/1129
Abélard arrive à
Saint-Gildas On peut se demander par quel cheminement Pierre Abélard a pu accepter de devenir abbé de ce monastère au bout du monde, si éloigné de Paris ou de Nogent-sur-Seine et du Paraclet où il demeure depuis 1122/1123. Cet homme si attaché à son métier d'enseignant va du jour au lendemain abandonner ce qu'il aime pour se consacrer à la direction d'une abbaye de moines rebelles et voir se disperser la communauté qu'il a créée au Paraclet. Alors qu'il est déjà âgé de 48/50 ans, qu'est-ce qui va le conduire à s'engager dans cette nouvelle vie ? |
Les explications d'Abélard Abélard s'est donc réfugié au Paraclet dans
l'ermitage qu'il s'est construit : Si l'on en croit Abélard,
c'est donc pour fuir ce danger qu'il accepte de s'exiler à l'extrême
ouest, comme dit-il, saint Jérôme s'est exilé en Orient, à Bethléem, au IVème siècle. Son désarroi est tel qu'il pense même, à certaines
heures, partir en pays musulman - sans doute en Espagne - où,
croit-il, il sera bien accueilli en raison même de son différend
avec les autorités chrétiennes. Illusions ou exagérations
littéraires ? |
Une toile de fond politique
Les raisons avancées par Abélard ne disent
rien des tractations politiques qui n'ont pas pu ne pas exister
pour la nomination d'un maître aussi connu à la tête d'une
abbaye bretonne. L'accord du roi Louis VI et celui de
Suger, ancien supérieur d'Abélard à Saint-Denis, ont sans doute
été indispensables. Pour ce dernier, Abélard en convient. |
L'abbaye de
Saint-Gildas de Rhuys Histoire L 'abbaye est fondée au 6ème siècle (536) par Gildas, moine venu d'Angleterre (Probablement du Pays de Galles, ou alors d'Irlande). Il l'a construite en bois sur les restes d'un oppidum romain. L'abbaye devient vite célèbre, et adopte la Règle de St Benoît en 818. Elle prospère du 6ème au début du 10ème siècle. Elle accueille alors quelques 150 personnes. |
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Au Xème siècle, elle est détruite lors des invasions normandes. Elle subit principalement deux raids normands en 914 et 919. La communauté s'enfuit en emportant les reliques de son fondateur. Daoc est alors abbé. Il dépose ces précieux trésors à Bourg-Déols près de Châteauroux en Berry où il entreprend de construire un monastère. L'abbaye de Saint-Gildas de Rhuys abandonnée tombe alors en ruine. A la demande du Duc de Bretagne, Geoffroy 1er, un certain Félix, moine de l'abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire la reconstruit, en pierres cette fois-ci. Commencée en 1008, la reconstruction s'achève en 1032 par la consécration de l'église par Judicaël, évêque de Vannes et frère du Duc. Félix meurt le 4 mars 1038. Plusieurs abbés succèdent à Félix. Un certain Robert est le prédécesseur d'Abélard et mourra vers 1130. |
Le site Pour le touriste d'aujourd'hui, Saint-Gildas de Rhuys est une station estivale charmante et très fréquentée de la côte sud de la Bretagne, tout près du Golfe du Morbihan. En bordure de mer, alternent les hautes falaises granitiques, les petites plages ensoleillées, les criques abritant de petits ports comme "le port aux moines". Le climat est toujours doux mais dans les mois d'hiver, les tempêtes d'ouest donnent évidemment au paysage un caractère plus austère. |
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Une très belle abbaye romane Ces indications sont très intéressantes et très précieuses car elles nous confirment qu'Abélard a connu le choeur, le déambulatoire et le transept quasiment tel que nous les voyons aujourd'hui. Il a célébré la messe entre ces colonnes et ces chapiteaux magnifiques. |
Déception d'Abélard En
acceptant cette fonction d'abbé, Abélard
entre dans le corps des hauts
dignitaires de l'Église. Néanmoins sa
déception est grande. Il comprend que
les difficultés qui l'attendent vont
être nombreuses. |
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Son ambition de réformer les moeurs monastiques se heurte d'abord à l'hostilité des moines qui ne veulent pas changer de mode de vie et sont décidés à garder concubines et enfants mais aussi aux brimades du seigneur local qui s'est emparé de tous les biens du monastère privant celui-ci des revenus attachés aux biens fonciers. Cette tache de réformateur s'inscrit parfaitement dans la ligne de la réforme dite "grégorienne" initiée par le pape Grégoire VII 1073-1085. Le pape entendait lutter contre des maux très répandus dans cette Église du XIe : le "Nicolaïsme" et la "Simonie", si l'on veut employer le langage de l'époque. La Nicolaïsme, mot qui fait référence à une secte désignée dans l'Apocalypse 2,6, est le péché des prêtres et des moines qui ne respectent pas le célibat et vivent avec concubines et enfants. La Simonie fait référence à Simon le magicien, act. 8,18-24. C'est le péché de ceux qui achètent les charges ecclésiastiques où qui accaparent les biens des églises ou des monastères. On voit que le programme d'Abélard est tout à fait conforme à celui de Grégoire VII. Un concile oecuménique - Latran I - se tiendra en 1123 à Rome sous la présidence du pape Callixte II et confirmera cette orientation de la réforme. Abélard en a-t-il eu des échos ? |
Abélard et ses moines
On comprend que les moines de
Saint-Gildas ne veuillent pas
abandonner femmes et enfants et
qu'au contraire ils réclament de
leur abbé de quoi nourrir leur
famille. Que deviendraient ces
femmes et ces enfants abandonnés
? Où iraient-ils ? On sait
comment un contemporain
d'Abélard, Robert d'Arbrissel, a
pris en pitié certaines de ces
femmes de prêtres répudiées et
errantes pour les réunir à
Fontevrault. Mais Abélard ne
dispose plus des revenus du
monastère puisque le seigneur
local a fait main basse sur le
foncier de l'abbaye. |
Une scène non
moins étonnante se déroule à
Nantes où Abélard est venu
visiter le comte Conan III qui
est malade. Un serviteur de la
suite d'Abélard a reçu mission
de ses frères
d'empoisonner l'abbé au cours du
repas. Mais c'est un moine qui,
par ignorance, mange la nourriture
empoisonnée destinée à Abélard et meurt sur le
champ. Le serviteur criminel, épouvanté, s'enfuit
! |
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A bout de
ressources, Abélard en appelle à l'autorité
d'Innocent II qui dépêche un
légat, l'évêque Geoffroi de
Chartres, pour excommunier les
plus récalcitrants. Rien n'y
fait, le calme ne revient
pas à Saint-Gildas. Eternel
persécuté, Abélard n'a de
cesse de s'apitoyer sur son
propre sort. |
Abélard, abbé reconnu
S'il est vrai qu'Abélard a
peu de succès dans le
gouvernement de son abbaye,
malgré ses déboires il fait
néanmoins partie de la haute
société féodale et
ecclésiastique et est
reconnu comme tel comme il
est possible de le vérifier. |
Sainte-Marie
d'Argenteuil confisquée
: 1129 "Les voyant dispersées de tous côtés par l'exil, je compris que c'était une occasion qui m'était offerte par le Seigneur pour assurer le service de mon oratoire. J'y retournai donc, j'invitai Héloïse à y venir avec les religieuses de sa communauté ; et, lorsqu'elles furent arrivées, je leur fis donation entière de l'oratoire et de ses dépendances, donation dont, avec l'assentiment et par l'intervention de l'évêque du diocèse, le pape Innocent Il leur confirma le privilège à perpétuité pour elles et pour celles qui leur succéderaient;"
Pierre les accueille au
Paraclet et en fin de
compte leur donne cette
propriété foncière qui
est la sienne. Ce sont
en même temps de belles
retrouvailles pour ce
couple qui a vécu marié
pendant si peu de temps
et qui est séparé depuis
plus de dix ans. Héloïse
devient la supérieure de
ce nouveau monastère
féminin. Le 28 novembre
1131 le pape Innocent II
confirmera la donation
d'Abélard. |