Le poème
adressé par Abélard
à son fils Astrolabe
"C'est le titre donné par
Jean-Barthélemy Hauréau dans son édition du manuscrit de 1040 vers
de la Bibliothèque Nationale en 1895. (1) C'est un poème didactique
de morale écrit totalement en distiques élégiaques. Aussi bien dans
son contenu que dans sa structure il suit un modèle classique. Avec
raison on le tient - au moins pour certaines parties - pour une
oeuvre de Pierre Abélard adressée à son fils Astrolabe. Au cours du
poème on trouve dans plusieurs endroits des références soit à
Héloïse soit aux travaux d'Abélard. Un passage mérite spécialement
l'attention, (voir ci-dessous) c'est celui où Abélard donne
concrètement son avis sur les plaintes amoureuses d'Héloïse maintes
fois répétées et sur son refus de faire pénitence." |
1
- Astralabi fili vite dulcedo paterne doctrine studio pauca relinquo tue maior discendi tibi sit quam cura docendi hinc aliis etenim proficis inde tibi cum tibi defuerit quid discas discere cessa nec tibi cessandum dixeris esse prius non a quo sed quid dicatur sit tibi cure auctori nomen dant bene dicta suo |
Astrolabe,
mon fils, la douceur de la vie de ton père Je ne consacre que peu de d'attention à ton travail studieux. Cherche d'abord à apprendre plutôt que de vouloir enseigner, Dans ce dernier cas : aux autres le profit, dans le premier: à toi le bénéfice. Si tu ne comprends pas ce que tu apprends, cesse d'apprendre, Tu aurais même dû arrêter plus tôt. Ne te soucie pas de qui te parle, mais de ce que l'on te dit, Rends justice à l'auteur s'il parle bien. |
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- sunt quos oblectant adeo pecata peracta ut numquam vere peniteant super his ymmo voluptatis dulcedo tanta sit huius ne gravet ulla satisfacio propter eam est nostre super hoc Eloyse crebra querela qua michi qua secum dicere sepe solet si nisi peniteat me comississe priora salvari nequeam spes michi nulla manet dulcia sunt adeo comissi gaudia nostri ut memorata iuvent que placuere nimis |
Il en est qui se
réjouissent même des péchés qu'ils ont commis, Jamais vraiment ils ne les regrettent. Tant est grande pour eux la douce volupté de leurs fautes, Aucune volonté d'expiation ne vient charger leur âme. Ainsi notre Héloïse, sur ce sujet, élève de fréquentes plaintes, Et c'est à moi souvent qu'elle vient se confier. Mais si, moi, je ne fais pas pénitence pour mes anciens forfaits, Il ne me reste aucun espoir d'être sauvé. Elle est si douce pourtant la joie éprouvée dans ces fautes, Que leurs souvenirs ne nous réjouissent et plaisent pas moins. |